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Ce blog et les écrits qu'il contient sont mis à disposition par Michel Bosseaux (l'auteur) selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
 
 

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10 janvier 2007 3 10 /01 /janvier /2007 00:26
ouverture - fête - un sans-papiers - tatouage - iris -
battre ou se battre - un verre de lait - transmettre - soir - ressemblant - s'amuser - tardivement.




La photo avait été prise le soir même, à l'ouverture de la fête organisée par une association de soutien locale. On la lui avait transmise un peu trop tardivement, mais il savait que, même s'ils avaient réagi plus vite, cela n'aurait rien changé et qu'il leur aurait échappé, une fois encore. Et puis il ne pourrait pas les blâmer. Rien ne ressemble plus à un sans-papiers qu'un autre, dans la masse : le même regard de bête traquée, piétinée, mais un regard de défi aussi, ce défi qu'ils lancent à tous les autres, les chanceux, d'essayer de leur prendre le peu qu'il leur reste - leur dignité, leur âme.

Tout d'abord il avait hésité devant le cliché, pas très ressemblant. Et puis le récit de la soirée l'avait fait douter encore plus : se battre pour un verre de lait, ce n'était pas le meilleur moyen de passer inaperçu. Bien sûr il n'avait pas le choix, il lui fallait absolument en boire, il était programmé génétiquement pour ne pas survivre sans. Et le lait étant devenu extrêmement rare, il n'y avait vraiment que peu d'occasions où l'on pouvait espérer en trouver...

A se demander comment ici, dans ces circonstances...

Mais les questions de cet ordre attendraient. Pour l'heure, il était plus important de comprendre pourquoi un soldat parfaitement entraîné à rester dans l'ombre, même dans les cas de vie ou de mort, s'amusait soudain à les narguer ainsi.

Décidément, quelque chose lui échappait. Jamais sa cible ne se serait comportée ainsi... Pourtant, il lui fallait bien se rendre à l'évidence : ce tatouage sur le bras gauche n'avait été fait qu'en 12 exemplaires, et les 11 autres, traqués comme lui, étaient morts. Aucun doute là-dessus, il avait personnellement ramené leurs cadavres à la division, et une identification oculaire, dans leur cas surtout basée sur leurs iris si particuliers, n'avait pas laissé le moindre doute : un code barre tatoué sur l'iris, à l'encre magnétique, indécelable à l'oeil nu, et indélébile, ce n'était quand même pas si fréquent.

---

Le colonel Travis scrutait la nuit, du toit de l'immeuble où avait eu lieu cette fête. Il ressentait en même temps l'exaltation de la traque, la frustration d'avoir été encore une fois si proche, et si loin en même temps... mais aussi un grand calme.

Un jour plus si lointain, il aurait le n°7 en face de lui.

Alors, tous deux pareillement prisonniers de leur nature profonde, l'un la proie et l'autre le chasseur, verraient leur destin s'accomplir, inéluctablement, et savoureraient sans nul doute ce moment mythique où ils pourraient cesser de courir.

Dans le regard de l'autre, de part et d'autre de la mort, l'un victime et l'autre bourreau, ils seraient enfin rendus à eux-même.

Libres.

---


Travis ne sentit pas plus la balle l'atteindre qu'il n'avait entendu le coup de feu. Tout à sa méditation, il avait raté le moment.

La roue tourne, les destins se brouillent et se mélangent...
Il y eut bien, comme prévu, une victime et un bourreau...
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8 janvier 2007 1 08 /01 /janvier /2007 14:28
Sur une autre liste de mots, une tentative... Pas si simple, cette fois. Le résultat me laisse perplexe.

blonde - tasse de thé - marcher - gongorisme - météore -
maquignon - déliter - orque - syncope - niveler / nivellement - miellée


Il s'allume une gauloise blonde, se ravise, éteint la cigarette et se verse une tasse de thé. Cela fait une bonne heure maintenant qu'il marche ainsi, tournant en rond autour du bureau, s'énervant progressivement, au bord de la syncope à cause des mots qui ne viennent pas.

Ca a pourtant toujours été si simple, écrire ! Que se passe-t-il donc pour que subitement, ainsi... ?

Il était occupé à écrire un texte de commande quand le blocage est arrivé, comme cela, sans prévenir. Il y était question de la course folle d'un météore, de roches délitées, de miellée et d'orques... rien dont une plume versée dans le gongorisme (*) depuis des années ne peut venir à bout sans même y penser.
Seulement voilà, il y pense, il y pense... et rien ne vient ! Le flot est tari, aucune image ne lui vient, et il est là, une tasse de thé bien serrée dans ses deux mains tremblantes, à ne plus savoir que faire, pour la première fois de son existence, devant ce nivellement par le bas incompréhensible de son inspiration.

En parfait maquignon des mots, il a bien sûr de nombreux tours dans son sac. D'autres textes en cours, d'autres mots plus aimables que ceux-là qui le bloquent, pourraient sûrement lui offrir le salut, réamorcer le mouvement. Il l'a tenté, ce contournement... Le problème a persisté.

Lui qui jusqu'ici ne s'est jamais remis en question, réalise soudain qu'écrire n'était plus un plaisir, même plus une habitude, juste une sale manie, ces derniers temps. Comme une "pose", une façon de se donner une contenance, d'être. Bien loin, ses rêves de devenir romancier, d'inventer un nouveau genre, tranchant comme l'acier. Les manuscrits, tous refusés, il n'a pas eu le courage de les retravailler, ou de les proposer ailleurs. Ils dorment au fond de tiroirs ou de malles... Et lui, il s'est donné corps et âme à tout ce qu'il détestait, un genre totalement ringard, mais qui paye... une préciosité, une recherche effrénée de "beauté" au détriment du fond... des phrases ridicules à force d'être "gonflées" d'images en tout genre.

Dopeur de mots, voilà ce qu'il était devenu.

Mais aujourd'hui, c'est fini tout ça ! Tout athlète dopé finit par le payer de sa santé. Sa plume est morte, bien morte...

Il repense à son dernier manuscrit, le plus cher à son coeur... rangé comme les autres au fond d'un tiroir. Celui-là, il aurait pu l'améliorer pourtant, il avait les idées. Rien que d'y penser d'ailleurs, tout lui revient...

tout ?

mais oui !

Il se précipite sur le tiroir, sort le manuscrit, relit la première phrase, puis la suivante... et soudain, l'extase : les idées sont là.

L'écriture revient, frénétique.



Etre soi, voilà le seul remède à tous les blocages...

(*)
Le cultisme ou cultéranisme ou gongorisme (stilo culto ou culteranismo en espagnol) est l'un des styles littéraires de la littérature baroque espagnole dont le poète castillan Luis de Góngora est emblématique. Il se caractérise par une profusion ornementale de métaphores et s'oppose au conceptisme. (Wikipedia)
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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 21:25
Un sourire parasite persiste à mes lèvres. Bonheur télépathe, je te sens toujours. L'atmosphère, écrasée de contraintes et conventions, n'arrête pas la diffusion. Je n'ai pour l'heure que des signes normalisés pour avancer vers toi, de satellites en satellites, mais toutes les formes sont bonnes, aucune n'altère les hauts-fonds de notre infini.

Délaissés déjà le maquillage de silicium et d'électrons, les fabuleuses avancées qui ne mènent qu'à avancer sans fin. Le flot me porte sans m'englober. Je gère mes dérives, en orbite autour de cette frange probable de mon futur, stationnaire au dessus de l'indifférence que tu ne m'inspires pas.

Des passions rétroprojetées me ramènent à l'absurde de tout ça. L'instant d'après, je te rejoins, remonte le temps le long d'une larme qui un jour n'aura pas coulé, remonte le flot nerveux jusqu'à l'image de moi au fond de ton coeur.

La fusion s'opère d'elle même.

Le sourire revient. Il était parti sans bruits, tellement il est fragile.
Je sens le tien me répondre.

Arrêt sur image.


Dans quelques heures, écran blanc, je danserai à nouveau de noeuds en noeuds de notre toile, où nous ne serons jamais à plus d'un code de distance.

L'amour.


Et il y aura d'autres images ...
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4 janvier 2007 4 04 /01 /janvier /2007 13:55
Respirer de l'or, et me sentir léger. Célébrer l'alchimie en baissant respectueusement la tête devant Sa Source. Plonger jusqu'à me perdre dans la transparence, qui me ramène instantanément à un regard. Je tourne la tête, et tu es là.
 
Les rêves sont bien faits.
 
Sirène silencieuse, mais pas moins attractive, je te suis dans les méandres scintillants de forêts où je me confond peu à peu avec Gulliver. Nous passons, mais la beauté en reste, comme une autre se superpose déjà. Bientôt, je ne sais plus où ni quand je suis, et ne m'attarde pas à cette logique extérieure. Tu es devant, et nous volons.
 
Tout va bien.
 
A bien y réfléchir, respirer ne me manque que pour le plaisir de retenir mon souffle devant toi. A défaut, je fais des bulles avec des pépites dedans. Pas encore assez doué pour y mettre des étoiles.Tu ris de bon coeur.
 
Nous valsons.
 
Et toujours plus haut nous volons, chute inversée. Icare nous comprendrait.
Le vol s'achève à la surface d'un baiser. 
 
 
Des gouttes de lune jusque sous la peau, nous sêchons lentement, sans un mot de trop, juste une chorégraphie ancestrale. Un ballet pour les dauphins, qui au large applaudissent de leurs corps entrant et sortant de la mer.
 
Puis le ciel éteint ses lumières, pour ne pas déranger.
Je glisse de ton sommeil dans le mien. Le vent se pose sur nous et nous borde ... 
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3 janvier 2007 3 03 /01 /janvier /2007 09:09
Comme une porte qu'on ouvre, et le courant d'air qui vient et nous prend, un sort, impossiblement jeté dans ce lieu sans portes ... qu'importe, la magie opère, et nous foulons le monde sans le voir, nous attardant sur ses plages, où nous pouvons aussi, au son de la musique mère, ne plus entendre que l'apaisement soudain de deux syncopes, avant que le soleil n'embrase l'horizon..

Mains nouées, nos regards peignent le verre à même l'air, contours fins, laissant le sable pour réchauffer nos pieds et épouser nos corps en attendant que vienne la maison autour de cette fenêtre sur une autre vie.
Nos formes creusées chantent qu'elle sera nôtre, juste demain. Nous entendons tout mais ne nous retournons pas.

Il faudra d'ici là que le monde réinvente plus haute Sa Loi pour nous remettre dans nos cages, puisque c'est certain, le spectacle doit continuer. Et il continuera peut-être bien comme nous rugirons en coeur, mais nous aurons changé de cages au moins, et nous mangerons à notre faim, pour la première fois de notre règne animal.
Un festin d'ardeurs et de vérité.

Le monde tournera rond sans rien remarquer. Nos ambitions s'insinueront dans la trame pour qu'il ne se doute pas de cette force qui nous protège.
Nous verrons exploser devant nos pas synchrones toutes les douleurs passées et celles à naître, et la belle assurance des bourreaux ordinaires. Nous en rirons, gais terroristes, et comme nous croîtrons, se multipliera la joie.

Nous déménagerons vers le bonheur sans laisser d'adresses conformistes ou de brillants discours consensuels, ou ce qui sera inventé d'ici-là de raisonnable et facile et si doux au toucher, si facile à oublier, nous libérer de nos étreintes équilibristes, marchant en silence sur nos cordes sensibles, et d'autres encore que nous ne soupçonnions pas.


Comme une porte que l'on ferme, à la fin nous piègerons la magie, tant que les murs ne seront transparents qu'à nos yeux, tant que les couleurs ne déteindront pas à l'air marin. Et le jour où les contours se feront indistincts, nous suivrons l'aspiration des cieux, avec nos souvenirs souriants comme seuls bagages pour bien commencer une éternité ensemble ...
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