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13 août 2023 7 13 /08 /août /2023 10:58

Texte écrit dans le cadre du défi créatif d'aout 2023.


 Scotty, énergie ! Ta chambre ne va pas se ranger toute seule.

Scott leva un œil blasé vers sa mère, qui venait de faire irruption sans même frapper.

- Ahah, hilarant maman. T’inquiète, j’adorerais te téléporter ailleurs si je pouvais. Ca m’éviterait tes références pourries !

- Pas si pourries que ça, vu que tu les comprends ^^

Scott soupira. Inutile de chercher à avoir le dernier mot, c’était peine perdue.

Il regarda sa mère, qui commençait déjà à ramasser par terre certains de ses livres. Quand elle s’y mettait, c’était un véritable ouragan, pour qui « ranger » signifiait surtout « mettre à un endroit où plus personne jamais n’aurait l’occasion de poser un œil dessus ». Il valait donc mieux qu’il s’en occupe lui-même avant qu’elle fasse des dégâts irrémédiables.

Il ferma son manga, se leva de son lit, récupéra à la volée la pile de livres que sa mère tenait déjà en main, et commença à les ranger dans l’armoire.

Il se retourna et s’apprêtait à en ramasser d’autres quand il se rendit compte que quelque chose clochait. Annie, sa mère, était généralement une boule d’énergie et de bonne humeur inépuisable, jamais à l’arrêt, jamais à court de mots ou de gestes pour motiver et pousser les gens autour d’elle à se dépasser. On aurait pu croire que son sourire avait été gravé sur son visage dès la naissance car, même en l’observant quand elle se croyait seule, il ne l’avait jamais vue sans. Il ne l’avait jamais vue non plus autrement que parfaitement maquillée MAIS les cheveux perpétuellement en bataille, à force de courir dans tous les sens.

Et là, non seulement elle avait arrêté de bouger et le regardait fixement, mais on aurait dit que son sourire sonnait faux. Le mascara semblait avoir légèrement coulé autour de ses cheveux, qu’elle avait rassemblé en un chignon absolument impeccable mais totalement affreux, et certainement pas du style de cette femme qui aimait affronter la vie les cheveux libres.

- Ca va, Maman ?

Annie sursauta, le regarda en semblant ne pas comprendre, puis fit « oui » de la tête en pinçant les lèvres, et sortit de la pièce précipitamment.

Quelque chose n’était décidément pas normal, et Scott la rejoint au salon, où elle s’était immobilisée, silencieuse, une main à hauteur de sa bouche … « mais … elle n’est quand même pas en train de pleurer ? »

« Maman ? »  insista Scott

Elle sursauta encore, se retourna, les larmes lui coulant sur les joues.

Il comprit. Ils n’étaient de nouveau plus que tous les deux.

 

Il prit sa mère dans ses bras sans un mot, et ils restèrent un long moment ainsi, sans rien dire. Puis, il se dégagea doucement, afficha le même sourire dont elle avait fait son arme  de prédilection, et, un bras autour d’elle, la fit s’assoir dans le canapé.

Il s’agita alors dans la cuisine, tout en chantonnant certaines des chansons préférées de sa mère, qu’elle entendit bientôt lui répondre. Il lui prépara un cappucino, ajouta un cœur en mousse sur le dessus, disposa sur le plateau quelques biscuits comme elle les aimait tant, et vint s’assoir à ses côtés, en chantant plus fort.

Ils passèrent une heure assis là, sans autre parole que celles des chansons de Jean-Jacques Goldman que sa mère aimait depuis son enfance. Elle avait posé sa tête sur l’épaule de son fils et les larmes avaient cessé de couler.

Et puis d’un coup, comme si on avait subitement basculé l’interrupteur, elle se tourna vers lui, son sourire de nouveau là, et lui murmura à l’oreille.

« Ne crois pas que tu vas échapper au rangement pour autant ».

C’était tellement décalé que Scott éclata de rire, puis elle aussi.

« Je sais Maman, je sais. »

Et ils retournèrent tous les deux vers la chambre où ils s’activèrent longuement, en chantant encore et en s’envoyant des vannes, comme si rien n’était arrivé, comme si tout allait bien en somme.

 

Et c’était le cas, bien sûr. Ou en tout cas ça le serait bientôt.


Comme elle le lui disait souvent, si on bouge assez vite, si on met assez d’énergie à ce qu’on fait, il arrive que la tristesse et toutes les choses négatives de la vie ne nous rattrape pas.

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