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6 septembre 2007 4 06 /09 /septembre /2007 11:04
#002 d'eli cieux
rentrée, stress, poupées, marionnette, harmonie, feutré, pétillant, verdure,sable, arbre....


L'ensemble des listes reçues dans le cadre du projet "logorallyes", et ce que j'en ai fait jusqu'ici, est consultable ici.



Raphaël observa le théâtre un long moment, ne parvenant pas encore à le quitter vraiment, à monter en voiture et partir vers sa nouvelle vie. Il en avait rêvé, pourtant, de ce jour, où il pourrait laisser les fils de ses marionnettes en d'autres mains, plus jeunes et pleines d'idées neuves que les siennes.  Plus jamais le stress de la rentrée, quand le spectacle est tout neuf et qu'on ne sait pas s'il plaira, ainsi que les nouveaux personnages... Plus jamais non plus les critiques de ceux-là qui lui demandaient, cyniquement moqueurs, ce que ça lui faisait d'encore jouer avec ses poupées, à son âge...

A 70 ans désormais, il avait décidé qu'il était temps, même si l'envie était encore là, même s'il y avait trouvé toute sa vie durant une paix et une harmonie avec lesquelles les plus belles plages de sable blanc, et tous les arbres et la verdure du monde, auraient bien du mal à rivaliser...

C'est à pas feutrés, le regard pétillant à nouveau au souvenir de tous les spectacles passés, de la joie des enfants et des plus grands aussi, des immenses triomphes populaires qu'il avait connu, qu'il avait fait le tour une dernière fois, des loges à la scène,  de la salle aux guichets.  Toute l'équipe était là, peut-être encore plus émus que lui. Ils ne disaient rien, il n'y avait pas besoin de mots pour exprimer. Il les avait tous recrutés, formés... ils avaient appris avec lui l'art du spectacle de marionnettes, raconter une histoire qui puisse plaire à tous, sans forcément être "simplifiée". L'humour, c'est facile, mais il leur avait aussi appris à exprimer la tendresse, la colère, la douleur... Il avait toujours voulu un vrai théâtre d'ambiances.  Les réservations à chaque fois complètes lui avaient donné raison.

Avant de rejoindre sa voiture, il les avait longuement embrassés, serrés dans ses bras. Puis, symboliquement, il avait donné la clé des lieux à Manuel, son propre fils. Le nouveau directeur.

Il savait qu'il n'avait aucuns soucis à se faire, Manuel était meilleur qu'il ne l'avait jamais été. Les 5 dernières saisons, il avait écrit quasiment tous les spectacles, supervisé la création des marionnettes, aidé à la formation des nouveaux ... lui, vieillissant, était là dans le rôle du patriarche, pour souder l'équipe, partager son expérience, et à l'occasion animer l'un ou l'autre personnage, comme il avait toujours tant aimé le faire.

Il pouvait facilement se passer d'être le patron, mais pourrait-il vraiment ne plus être ce clown tantôt hilarant, tantôt triste, par marionnettes interposées ?
Parviendrait-il à reprendre les fils de sa vie, qu'il n'avait à vrai dire vécue qu'ainsi, par procuration, et réaliser tous ces projets qui lui tenaient tant à coeur ?

Seul l'avenir le dirait... mais sa femme avait bien mérité cette retraite dorée à laquelle ils pouvaient prétendre. Le théâtre était plus que rentable, leurs économies en témoignaient. Ils n'auraient à se soucier de rien.

C'est en pensant à Maria, son épouse, que Raphaël parvint à détourner les yeux de SON théâtre, qui n'était plus le sien désormais.
Il monta en voiture, et démarra, sans un regard de plus, qui aurait risqué de le pousser à continuer, encore.

Il y a un temps pour chaque chose, se répéta-t-il pendant plusieurs minutes, en s'éloignant...



Il lui fallu plusieurs mois pour s'en convaincre tout à fait.

Il revint souvent sur les lieux, pour assister discrètement aux premières des nouveaux spectacles. Ce n'est qu'en voyant ainsi son oeuvre se poursuivre, les triomphes de son fils et de toute l'équipe, qu'il finit par trouver la paix.

En effet, il y avait un temps pour chaque chose. Et pour celle-là, il avait bien profité de tout son temps.
Il n'avait rien à regretter.
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commentaires

M
bon d'accord, désolée. Oui, je crois que dans ce cas, il faut rajouter quelque lignes. C'est pas facile de Tout mettre dans un texte ou alors il faut le rallonger. De toute façon , chez moi, les histoires ont leur vie propre et font finalement ce qu'elles veulent.
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F
disons que je n'ai pas voulu trop insister dans le texte sur cet aspect-là de la vie de Raphaël, je me rend compte maintenant que cela crée un vide...Tout mettre dans un texte, ça signifie aussi trop souvent tuer toute possibilité pour le lecteur de le complèter par son imagination. Et il me semble que ce n'est jamais bon de fermer ainsi les portes, ça empêche le texte terminé de respirer, et donc de prendre toute son ampleur...
M
je continue de penser qu'il a vraiment vécu sa vie, qu'on sent qu'il a envie de continuer et qu'il aime ça. Et jecrois qu'il peut passer le relais à son fils sans nécessairement abandonner sa passion, le fondement de son éxistence n'était pas d'être patron, c'était l'amour de son métier. Et je crois qu'il peut faire ce qu'il aime et être lui même; bon, je sors, je te laisse tranquille...
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F
je n'ai pas suffisamment précisé mon personnage (dans le texte, donc) pour que mon affirmation de fuite soit indéniable. Ce que j'ai en tête, c'est vraiment un homme qui a vécu par procuration, mal à l'aise dans la vie en dehors, avec les autres, timide, complexé, mais prenant toute sa mesure aux travers de ses marionnettes. Un homme qui sait comment communiquer des émotions gràce à ses marionnettes, mais qui ne sait pas comment faire de même, ou bien même juste gérer les siennes, en vrai.De la façon dont j'ai écris, ta perception est aussi juste que la mienne... et en théorie oui, rien n'empêche d'être vraiment qqun en dehors de son métier, rien n'oblige à abandonner tout à fait sa passion, sinon des circonstances de vie, des personnes qui ne supportent plus cette "fuite" qui fait passer trop d'heures à une activité... et aucune ou presque en dehors. Si l'équilibre est respecté, alors tu as raison...
M
hé bien moi je ne pense pas qu'il a fui sa vie, au contraire, il a fait toute sa vie ce qu'il aimait, à fond. n'est ce pas ce qu'il faut faire ? Et je ne vois pas pourquoi on devrait obligatoirement arrêter une activité que l'on aime "parcequ'on a plus l'âge", alors qu'on est capable et souhaite continuer, bon là c'est pour faire plasir à sa femme, pour l'accompagner.
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F
Il a "fuit sa vie" en ce sens qu'il a toute sa vie joué des personnages pour ne pas avoir à affronter le sien, le vrai raphaël que maintenant sa femme réclame... et qu'il se demande comment être cet homme... puis il s'arrête autant pour sa femme que parce que depuis 5 ans ce n'est plus loin qui a les idées, il empêche juste son fils de passer à l'étape suivante...
S
De ces quelques mots en sort un personnage attachant, derrière lequel on peut trouver un message plus large: la vieillesse, la retraite, la dépression ( beaucoup de retraités sombrent dans cette maladie ), l'ennui, la mort...Heureusement pour Raphaël, il trouve du réconfort à transmettre à son fils l'affaire familiale. Il n'a pas l'air d'être l'un de ses " emmerdeurs" qui viennent mettre leur grain de sable dans les pattes du fiston. Très agréable à lire. Et les mots "harmonie", "arbre, "sable", "verdure" intelligemment placés je trouve; 
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F
Pas un emmerdeur, non, juste un vieux clown qui a en quelques sortes fuit sa vie pendant toute sa carrière, et qui a un peu de mal à tourner la page... mais un clown qui a su transmettre sa passion, et sait se satisfaire de voir son oeuvre continuée (et de belle façon en plus) par son fils...Merci pour les compliments... dans presque toutes les listes de mots que je reçois, il y a les mots qui serviront d'ossature au texte, et puis ceux qu'il faudra contourner. "Arbre, sable, verdure" ont été, dans ma façon de voir cette liste, rangés dans la deuxième catégorie. Mais il y a "contournement" et "contournement"... il ne faut pas faire n'importe quoi quand même ! :-)
D
il y a un temps pour toutes choses....je retiendrai ceci... cela m'a fait du bien de me le dire ... je fais confiance aux inconscients de chacun.... ce message tombe à pic ! bisous et bravo...
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F
merci à toi, et heureux que cette phrase ait pu t'aider dans ce que tu vis...