30 août 2007
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Ce 6ème texte du projet est un peu particulier. En effet, parallèlement à la liste de mots imposés, il répond (en tout cas, tente de le faire), à une autre contrainte, celle d'un Début & Fin lancé par Claire dans le cadre de notre Communauté "Ecriture Ludique". Les textes résultants étant à publier aujourd'hui, voici le résultat, pile dans les temps.
#016 Marie B.
Trépas, résurrection, agonie, râle, posthume, défunt, existence, âme, respirer, vie
L'ensemble des listes actuellement reçues, et ce que j'en ai fait jusqu'ici, est consultable ici.
L’initiation était derrière nous et j’avais survécu à la première élimination ; au choc de cette expérience succéda une période d’accablement à laquelle aucun d’entre nous n’échappa.
Ce n'était quand même pas naturel de jouer ainsi les limites extrêmes de nos existences terrestres, de précipiter l'inéluctable pour mieux s'en délivrer. Bien sûr, nous avions tous choisi en conscience de suivre ce programme destiné à nous offrir une vie réellement éternelle ici-bas, sans les tourments de l'âme que la peur de la mort engendre. Mais le prix à payer était très élevé, peut-être même trop. A chaque nouveau râle d'agonie d'un de nos compagnons, un peu de cette âme que nous voulions tant sauver semblait tomber en cendres. Nous devenions chaque jour encore plus insensibles, inhumains. Et ceux qui réussissaient à garder leurs émotions intactes avaient de plus en plus de mal à respirer, et finissaient invariablement par ne pas revenir d'un de nos voyages initiatiques.
Après le trépas dans les plus atroces souffrances, il y avait la résurrection. Mais pas pour tous. Certains restaient simplement des défunts. Pour eux, nulle éloge posthume, nulle prière. Ils étaient des "faibles", ils avaient choisi le chemin mais n'avait pas su en être digne. C'est ce que nous répétaient inlassablement nos instructeurs. Et comment ne pas les croire, alors que nous-mêmes nous sentions devenir si forts ? Plus rien ne semblait pouvoir nous atteindre, nous étions invincibles, et nos pouvoirs sans limites.
A chaque "voyage" en effet, nous revenions avec quelques nouveaux Qualrechs, comme les ont nommés nos instructeurs. Ils les décrivaient comme des entités d'un autre plan, impossible à percevoir pour nous et qui, au cours de nos "expériences", s'agrippaient à nous, et agissaient en symbiose avec nos émotions. Jamais deux Qualrechs identiques ne pouvaient s'agripper ainsi à la même personne, et dès que le premier était là, les autres venaient tous, invariablement.
Au bout des 10 voyages imposés, nous avions tous l'ensemble des Qualrechs possibles.
L'initiation était donc finie, et j'y avais survécu. Maintenant, nous commencions une nouvelle phase, "l'Acclimatation", au cours de laquelle nous devrions apprendre à contrôler nos nouvelles facultés.
Aucun d'entre nous ne ressortirait de l'enceinte sacrée avant d'avoir trouvé la paix et l'équilibre de l'âme. Nous n'étions pas voués à faire le mal, mais bien à protéger ce monde. Au moindre signe de déviance, nos instructeurs seraient impitoyables
Jembar, le chef instructeur, m'avait pris à part, juste avant que ne commence l'acclimatation. Il avait toujours semblé très proche de moi, et son amitié attentive, bien que très souvent silencieuse (pour ne pas influer sur notre parcours), m'avait beaucoup aidé à traverser les épreuves successives.
Il m'avait dit qu'il voyait de grandes choses pour moi, si j'acceptais d'être vraiment celui que j'étais déjà, au fond, si j'acceptais d'enfin vraiment me regarder en face, et d'accepter de ne pas être comme eux, tous... "les autres" disait-il, parlant de mes camarades. Je serais leur chef, d'après lui. Du moins, pour ceux qui en sortiraient vivants. Les premiers signes de déviance apparaissaient, et les instructeurs se préparaient à une exécution.
Il me dit encore qu'il ne fallait pas que j'aie peur de devenir ainsi unique, qu'il m'aiderait autant qu'il le pourrait. Il avait senti mes angoisses, ces images atroces qui me réveillaient la nuit, et me faisait craindre que moi aussi, je ne dévie, finalement.
"Ne crains rien, disciple... ce n'est que ton âme ancienne qui lutte encore. Elle sera bientôt entièrement cendres, et ta nouvelle âme pourra descendre en toi et t'apporter la paix. C'est le seul chemin, plus tu lutteras et plus il sera long. Fais-moi confiance, lache prise."
J’aurais voulu me raccrocher à ses paroles, mais elles étaient trop glissantes et je retombais dans des cauchemars ordinaires.
#016 Marie B.
Trépas, résurrection, agonie, râle, posthume, défunt, existence, âme, respirer, vie
L'ensemble des listes actuellement reçues, et ce que j'en ai fait jusqu'ici, est consultable ici.
L’initiation était derrière nous et j’avais survécu à la première élimination ; au choc de cette expérience succéda une période d’accablement à laquelle aucun d’entre nous n’échappa.
Ce n'était quand même pas naturel de jouer ainsi les limites extrêmes de nos existences terrestres, de précipiter l'inéluctable pour mieux s'en délivrer. Bien sûr, nous avions tous choisi en conscience de suivre ce programme destiné à nous offrir une vie réellement éternelle ici-bas, sans les tourments de l'âme que la peur de la mort engendre. Mais le prix à payer était très élevé, peut-être même trop. A chaque nouveau râle d'agonie d'un de nos compagnons, un peu de cette âme que nous voulions tant sauver semblait tomber en cendres. Nous devenions chaque jour encore plus insensibles, inhumains. Et ceux qui réussissaient à garder leurs émotions intactes avaient de plus en plus de mal à respirer, et finissaient invariablement par ne pas revenir d'un de nos voyages initiatiques.
Après le trépas dans les plus atroces souffrances, il y avait la résurrection. Mais pas pour tous. Certains restaient simplement des défunts. Pour eux, nulle éloge posthume, nulle prière. Ils étaient des "faibles", ils avaient choisi le chemin mais n'avait pas su en être digne. C'est ce que nous répétaient inlassablement nos instructeurs. Et comment ne pas les croire, alors que nous-mêmes nous sentions devenir si forts ? Plus rien ne semblait pouvoir nous atteindre, nous étions invincibles, et nos pouvoirs sans limites.
A chaque "voyage" en effet, nous revenions avec quelques nouveaux Qualrechs, comme les ont nommés nos instructeurs. Ils les décrivaient comme des entités d'un autre plan, impossible à percevoir pour nous et qui, au cours de nos "expériences", s'agrippaient à nous, et agissaient en symbiose avec nos émotions. Jamais deux Qualrechs identiques ne pouvaient s'agripper ainsi à la même personne, et dès que le premier était là, les autres venaient tous, invariablement.
Au bout des 10 voyages imposés, nous avions tous l'ensemble des Qualrechs possibles.
L'initiation était donc finie, et j'y avais survécu. Maintenant, nous commencions une nouvelle phase, "l'Acclimatation", au cours de laquelle nous devrions apprendre à contrôler nos nouvelles facultés.
Aucun d'entre nous ne ressortirait de l'enceinte sacrée avant d'avoir trouvé la paix et l'équilibre de l'âme. Nous n'étions pas voués à faire le mal, mais bien à protéger ce monde. Au moindre signe de déviance, nos instructeurs seraient impitoyables
Jembar, le chef instructeur, m'avait pris à part, juste avant que ne commence l'acclimatation. Il avait toujours semblé très proche de moi, et son amitié attentive, bien que très souvent silencieuse (pour ne pas influer sur notre parcours), m'avait beaucoup aidé à traverser les épreuves successives.
Il m'avait dit qu'il voyait de grandes choses pour moi, si j'acceptais d'être vraiment celui que j'étais déjà, au fond, si j'acceptais d'enfin vraiment me regarder en face, et d'accepter de ne pas être comme eux, tous... "les autres" disait-il, parlant de mes camarades. Je serais leur chef, d'après lui. Du moins, pour ceux qui en sortiraient vivants. Les premiers signes de déviance apparaissaient, et les instructeurs se préparaient à une exécution.
Il me dit encore qu'il ne fallait pas que j'aie peur de devenir ainsi unique, qu'il m'aiderait autant qu'il le pourrait. Il avait senti mes angoisses, ces images atroces qui me réveillaient la nuit, et me faisait craindre que moi aussi, je ne dévie, finalement.
"Ne crains rien, disciple... ce n'est que ton âme ancienne qui lutte encore. Elle sera bientôt entièrement cendres, et ta nouvelle âme pourra descendre en toi et t'apporter la paix. C'est le seul chemin, plus tu lutteras et plus il sera long. Fais-moi confiance, lache prise."
J’aurais voulu me raccrocher à ses paroles, mais elles étaient trop glissantes et je retombais dans des cauchemars ordinaires.